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Vendée Globe - Jour 85

31.01.2021


Message de fin de journée, non pas que ce fut la grasse matinée ici, loin de là, mais j'avais besoin de penser un peu avant d'écrire. De regarder la mer, mon bateau et prendre le temps de vivre. Nouvelle nuit horrible, impossible de fermer l'oeil, impossible de trouver une position pour se caler, insupportable. J'ai fini par rester collé contre une cloison étanche, les yeux grands ouverts à regarder dans le vide toute la nuit. Beau moment de solitude.

Sous 2 ris et J3, il ne pouvais pas se passer grand chose, j'étais clairement sous toilé comme toujours, mais bon, j'ai quand même réussi à ne pas trop perdre sur mes copains. Devant ça va se calmer donc on va peut-être pouvoir recoller à Cali. On verra bien. Pour le moment, je veux juste sortir des alizés forts car c'est très compliqué pour La Fabrique. Mais purée… Je suis quand même fier d'être là où je suis ! 

Je n’ai pas gagné, c'est sûr. Mais quand je vois mon bateau qui pointe encore à la 16ème, 17ème, ou même 18ème place, alors que ça fait bientôt deux mois qu'on galère… On va finir par réussir à rentrer à la maison. Et même si Stéphane et Kojiro nous passent devant (ce que je vais tout faire pour éviter), je n'aurai aucun regret.  

Je commence à comprendre que cette aventure incroyable touche à sa fin, même s’il nous reste encore 10 jours de mer. J’en aurai profité d'une manière différente de la dernière fois, j'aurai appris tellement de choses qui vont me servir à vie. Le Vendée, j'avais toujours dit qu’on le vivait comme si chaque jour était le dernier, car tout peut arriver à n'importe quel moment. Depuis mes soucis de quille, je vis vraiment chaque minute comme si c'était la dernière. À chaque bruit, je me dis qu'il y a un truc qui a pété, que la quille va se balader, et c'est comme ça depuis très longtemps. 

Aujourd'hui, j'arrive à tenir presque 20 noeuds de moyenne avec mon bateau et je suis super fier. Je me fais toujours dessus à l'idée que je puisse casser encore un truc, mais j'ai vécu avec la peur depuis trop longtemps…J’ai décidé de profiter de voir La Fabrique voler vers la ligne d’arrivée, de ne pas avoir fait tout ce chemin le pied sur le frein. Le frein je n'ai pas besoin de l'enclencher de toute façon, il est naturellement là à cause de ma quille. Alors je profite d’avancer quand je le peux, et savourer de voir tout ce travail depuis 4 ans.

Je suis vraiment fatigué, je ne tiens bientôt plus debout à force de vivre sans arrête dans un bateau couché. Ce n’est pas super agréable et physiquement, j’ai beau avoir effectué une bonne prépa et n’avoir que 27 balais, je prends cher !  J’ai besoin de dormir avant d'attaquer les derniers jours. Avec le trafic maritime, le gros temps et le stress de la fin… Je vais profiter de la zone plus calme pour essayer de faire ça.  Et dans environ 10 jours, si tout va bien on arrive à la maison !!

Image d'illustration © Christophe Breschi / La Fabrique 



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