Après une difficile première partie de course, tant moralement que sportivement, Alan Roura a retrouvé le sourire. Une météo jusqu’ici capricieuse et désormais plus conciliante aidant, le skipper de La Fabrique se réjouit depuis 48 heures d’avoir osé un pari gagnant, de retrouver de hautes vitesses et d’avoir repris de l’avance sur ses poursuivants.
Les éléments contre soi, il faut savoir se créer sa chance. C’est ainsi qu’Alan Roura, après plusieurs jours à manger son pain noir, désespéré, a enfin pu prendre le destin de sa course en main. Débarrassé de l’anticyclone qui lui collait au tableau arrière depuis le 28 novembre, lorsqu’une avarie de vérin de quille l’empêchait d’attraper la bonne bascule de vent, le skipper de La Fabrique peut enfin affirmer ses choix stratégiques. À commencer par une très belle option au Nord des îles Crozet, le jeune Suisse faisant le choix de contourner une forte dépression lorsque ses concurrents préféraient lever le pied afin de la laisser s’échapper vers le Sud. Grand bien lui en a pris puisque, malgré l’obligation de ronger lui aussi son frein quelques heures afin de respecter son routage, Alan n’a cessé de « tartiner » dès qu’il a pu virer à l’Est. Depuis vendredi après-midi, La Fabrique flirte ainsi constamment avec les 20 noeuds de vitesse et compte désormais près de 300 milles d’avance sur Arnaud Boissières et Stéphane Le Diraison - avec qui il naviguait à vue en début de semaine. Mieux, ce dimanche matin, le navigateur suisse était le plus rapide de la flotte sur 24 heures, à plus de 17 noeuds de moyenne avec la plus grande distance parcourue (410 milles). De quoi rebooster la confiance en soi du benjamin de cette neuvième édition, envahi jusque là par le doute.
Déçu de n’avoir pu demeurer accroché au premier peloton comme il l’espérait, Alan Roura ne cachait effectivement pas son désarroi lors de sa vacation avec l’organisation de la course, samedi matin encore : « C’est dur à accepter d’être là où je suis, la première partie de course a été très dure moralement, un peu le sentiment d’une course à pas de chance quand ceux de devant ont de meilleures conditions. » Sans ne jamais oublier sa chance d’être « toujours en course », Alan était toutefois en droit de se réjouir de voir enfin les conditions météorologiques aller dans le sens de la bonne marche de La Fabrique. Et de pouvoir tenter un joli coup de poker en plein océan Indien. « J’ai arrêté de me plaindre et décidé de me concentrer sur ma course et de m’appliquer à naviguer proprement, confiait-il dimanche matin, non sans en sourire. Le retour du vent a aidé, forcément, tout comme de voir mon bateau filer à plus de 20 noeuds. J’avais besoin de reprendre confiance en moi et dans les performances de La Fabrique. Ça fait du bien au moral d’avoir des bonnes vitesses et de revenir en course. Ça fait longtemps que j’attendais ce moment et ça prouve encore une fois que rien n’est jamais joué, il ne faut rien lâcher. » Malgré les larmes et la colère, l’envie est donc toujours là, avec encore la moitié du parcours devant lui. « Je sais que je suis capable de remonter », conclut Alan, la rage et l’espoir de bien faire. Un bel exemple de combativité à, rappelons-le, 27 ans seulement.
Photo © Alan Roura / La Fabrique - #VG2020