Joint par l'organisation du Vendée Globe ce lundi matin, Alan raconte des conditions très rudes avec une très mauvaise mer en arrière d’une vaste dépression.
« Les conditions sont très musclées depuis quelques heures. C’est assez intense. On a une mer croisée, pas très belle, avec un vent instable qui passe de 20 noeuds à …. Tout à l’heure, j’ai pris 60 nœuds. C’est dur de tenir le bateau dans ces conditions-là sans pouvoir quiller.
J’essaie d’étudier une route avant tout sécurisante pour le bateau. Parce que jusqu’au Horn, ça s’annonce très compliqué. J’essaie de faire au mieux pour passer ça le plus proprement possible. C’est dur, le Pacifique n’est pas très gentil.
J’essaye de rester dans la course, même si là on est tous un peu en mode survie avec 3 ris dans la grand-voile et J3 ou tourmentin. Pas si simple à gérer alors que normalement, il n’y a pas tant de vent que ça d’annoncé. Et dans quelques jours, ils annoncent encore plus de vent. Je ne sais pas si je vais vraiment m’aventurer là-dedans, dans du 40 noeuds fichiers ce qui fait encore beaucoup plus que ce qu’on a là actuellement. Je m’accroche au mieux, mais pour tout notre groupe, là où on est placés, on n’a pas trop d’échappatoire jusqu’au Horn. On s’est un peu faits prendre au piège, il va falloir assumer jusqu’au Horn.
Le problème pour moi, c’est que pour empanner, ça commence à être compliqué. Avec ma quille au centre, dans de l’air, c’est assez sport. J’ai peut-être une route qui me permettrait de rester dans du vent assez cool, dans 30 noeuds à ras la zone des glaces à partir de demain. Je prends le gros du mauvais temps mais derrière je pourrais être un des premiers à avoir du vent plus calme et d’être dans la zone la plus au Sud de la route et chopper la première bascule pour essayer de partir avec. Mais ça voudrait dire naviguer que sous voiles d’avant, pour essayer de tenir le bateau car en termes d’équilibre, il peine un peu. Et ce n’est pas simple d’être très sous-toilé dans ces conditions parce qu’on subit plus qu’on avance. Là je suis au max à 70 % des performances du bateau.
La mer est horrible, croisée, très courte. Si tu n’as pas assez de vitesse tu te fais embarquer et si tu en as trop, le bateau plante et n’avance pas. Il faut trouver le bon compromis mais avec le vent qui change tout le temps, c’est difficile à trouver. La mer déferle, ce n’est pas ce qu’il a de plus rigolo pour le bateau, ça tape, ça bouge énormément… Ce ne sont plus les vacances à la mer !
Ce serait bien de sortir de tout ça mais j’ai l’impression que ça fait 4 jours que je dis que je passe le Horn dans 7 jours… Tous les jours je me prends un jour dans les dents mais c’est comme ça, ça prendra le temps qu’il faudra pour passer ce dernier cap. Ce qui m’inquiète le plus c’est derrière parce qu’on a toujours l’impression que dès qu’on passe le cap Horn c’est bon, c’est fini, alors qu’on peut encore se chopper de bonnes grosses dépressions et d’énormes orages. Jusqu’à la hauteur de Mar Del Plata au Brésil, c’est là où c’est presque le plus dangereux parce que les angles sont très serrés. Il va falloir être bon encore sur ce dernier bout. L’objectif premier maintenant, c’est vraiment de ramener le bateau à la maison. »
Image d'illustration © Pierre Bouras / La Fabrique