Nous voilà de nouveau tous dans un gros mouchoir de poche, les deux flottes se retrouvent et demain, il va falloir faire face à un système compliqué. Je regarde plusieurs fichiers météo, mais ils semblent tous être d'accord : on va prendre tarif ! Là tout de suite maintenant, je suis censé avoir 15 noeuds et j'en ai 23. Imaginez quand le vent moyen annoncé n'est « que » de 40 noeuds…
Je ne suis pas très à l'aise avec ce système, aucune envie de casser le bateau, il va falloir être bon ! J'ai pensé à ça toute la nuit, une petite remise en question ne fait jamais de mal, si ? Sinon je suis taquet, pied au plancher pour recoller l'avant du peloton même s’ils vont vite, très vite. Et là où on se trouve, on peut être à 10 milles d’écart et ne pas avoir le même vent du tout.
Le bateau va bien, le bonhomme aussi, un peu fatigué de ces derniers jours en mer car ça n'a pas été de tout repos. Mais il va falloir tenir jusqu'à la sortie de cette grosse dépression. Si ça peut vous rassurer, je n'ai même pas bu tant de café que ça !
Parfois, c’est vrai qu’on se demande ce que l'on fait ici, faut être complètement timbré pour se dire : « Tiens, non seulement je fais un Vendée Globe, mais je vais même y retourner une deuxième fois ! » La blague. Je dis ça mais je suis en plein rêve, je kiffe ce que je suis en train de faire. C'est juste que je me rends forcément un peu plus compte que ce qu'est le Vendée Globe sur cette édition que sur la première.
Ici le jour se lève, on est proches des Açores, cette nuit je verrai peut-être des lumières, ça dépendra de la visibilité. Voir une dernière fois la terre avant longtemps… Le Cap Vert ensuite peut-être, suivant la météo, mais généralement on s'en écarte car les îles ont des vents trompeurs.
Ce matin, j’ai du pain sur la planche, mais avant de régler pour la 52ème fois mes voiles, je vais me faire un petit déjeuner digne de ce nom : oeufs brouillés et pain grillé ! Enfin, on verra si j’y arrive vu l’état de la mer, ne pas en mettre partout dans le bateau !
C'était La Fabrique Mer-line, en direct de je ne sais où et au large de nulle part !
Image d'illustration © Christophe Breschi / La Fabrique