Repassés en neuvième position en début d’après-midi (heure française), Alan Roura et Frédéric Denis entament, à moins de 250 milles de l’arrivée, une fin de course riche en stress, à la lutte avec Generali, huitième. Passage de ligne prévue mardi matin tôt (heure française).
« On marmule, on essaye d’avancer du mieux qu’on peut ! » C’est un Alan à la fois enthousiaste et fatigué qui parlait cet après-midi de ses dernières heures de course à bord de La Fabrique aux côtés de Frédéric Denis. À 220 milles de la ligne d’arrivée de Salvador de Bahia, l’équipage franco-suisse compte une douzaine de milles de retard sur Generali, concurrent le plus proche. Plus rapides au dernier pointage, Isabelle Joschke et Pierre Brasseur ont l’avantage d’un bateau (ex-Safran, ex-Queguiner) plus performant à de nombreuses allures et d’une préparation plus longue et plus intense en amont de cette Transat Jacques Vabre 2017. Peu importe, les deux skippers de La Fabrique s’accrochent et ne comptent pas lâcher le moindre mille sur la possibilité de décrocher la huitième place du classement IMOCA, synonyme de podium non officiel des « non foilers ». « On a de la peine à tenir Generali, alors on met plus de bâches qu’eux, on ne s’épargne aucune manoeuvre, mais c’est cool d’être au contact, cette nuit on aurait presque pu se voir tellement nous étions proches, raconte Alan. Mais nous avons eu pas mal de grains, dont un qui nous a bien embêtés, on a de nouveau perdu du terrain. Finalement, le vent a fini par adonner et on a pu accélérer, ce qui nous a permis aussi de distancer Vivo A Beira. » Relégués à 40 milles de La Fabrique, Yoann Richomme et Pierre Lacaze ont en effet accusé un retard de 30 milles en moins de deux heures et restent aujourd’hui à distance raisonnable de la neuvième place. Mais attention, rien n’est jamais joué en course au large, Alan et Fred le savent bien : « Il faut rester méfiants, Yoann Richomme est capable de tout, il n’a pas remporté la Solitaire du Figaro 2016 pour rien ! »
Il est vrai que cette fin de Transat Jacques Vabre ressemble de plus en plus à une étape finale de « Solitaire ». Alan l’expliquait à la vacation de ce lundi matin, Fred et lui sont passés en mode « Figariste », à ne plus respecter aucun quart, à dormir et manger uniquement quand la situation le permet. Le jeune Suisse apprend sur cette course à se faire mal, lui qui est passé d’un projet Vendée Globe à l’ancienne - avec comme seul objectif de terminer son tour du monde - à un projet aux ambitions sportives plus élevées. Analyses des trajectoires, positions et vitesses des concurrents sont ainsi devenues son let motiv au quotidien. « J’avais déjà appris sur le Vendée à profiter de ces outils de navigation qui nous permettent de se situer par rapport au reste de la flotte, explique-t-il, mais là, on est plus proches que sur un tour du monde, il y a du stress en plus. Après, il ne faut pas non plus faire de connerie à trop regarder, il faut garder en tête de faire sa route… Mais c’est vrai qu’on aime bien savoir où en sont les autres ! » Attendus sur la ligne d’arrivée demain matin, heure locale (aux alentours de 4h, heure française), nos deux ex-Ministes risquent bien d’en baver jusqu’au bout et de s’offrir une belle bataille jusqu’aux tout derniers milles : au petit matin, les vents peuvent en effet devenir particulièrement mous et instables dans la Baie de Tous les Saints. De quoi pimenter encore cette véritable régate au long cours…
Image d'illustration © Christophe Breschi / La Fabrique Sailing Team