L’IMOCA Hublot a franchi la ligne d’arrivée de la Rolex Fastnet Race mardi 25 juillet à 4h42 (heure française) après 2 jours, 14 heures 27 minutes et 27 secondes de course. Alan Roura et Simon Koster terminent en 17e position à l’issue d’une épreuve difficile pour les nerfs, mais qui s’inscrit dans la continuité du travail initié par le duo suisse depuis le début de l’année.
« Vivement la transat ! » s’exclamait Alan Roura ce mardi, après quelques heures de sommeil. Reposé, c’est en pleine lucidité que le jeune marin préférait en effet positiver, après un résultat de nouveau décevant « sur le papier ». « On savait en partant que ce serait encore une fois très compliqué d’être dans le match, sur un format si court et avec la moitié du parcours au près, rappelle-t-il. Nous sommes de plus en plus au clair avec Simon : on sait désormais qu’on ne peut pas faire mieux par vent de face, alors on ne se pose plus de question, on serre les dents et on lâche les chevaux dès qu’on peut. D’autant que, cela peut être difficile à croire, on est presque contents du près qu’on a fait : c’est moins pire que sur les courses précédentes ! Il y a évidemment eu des phases meilleures que d’autres, dès que le vent mollit c’est vraiment très difficile, mais sur le bord de portant, la machine s’est lancée, c’était parti, dans des angles qui restaient assez serrés, où le bateau n’a même pas son meilleur potentiel. Dommage que la course n’a pas duré 3 heures de plus ! » Au-delà du résultat final, Alan et Simon demeurent en revanche satisfaits de la progression des données que leurs participations à ces courses de préparation - obligatoires dans le processus de participation au Vendée Globe - leur permettent d’accumuler, essentielles à la rédaction du mode d’emploi du bateau. Et le jeune skipper de souligner sa propre évolution au niveau de son comportement à bord : « Le positif est que dans ces conditions, on a bien pu tester la fiabilité du bateau. On lui en a mis plein la tronche et maintenant, on sait qu’on peut y aller gaiement : il tient ! Je sens que je me libère aussi là-dessus, dans ma capacité à tirer dans la machine. Même Simon m’a dit par moments que j’y allais fort ! Ça me permet de voir les limites du bateau et, globalement, il est ok pour y aller ! C’est un vrai bateau de gros temps, il a besoin de gros temps. Idéalement, juste pas au près (rires). »
Car c’est bien là, encore et toujours, que réside la plus grande faiblesse du duo Roura-Hublot, quand bien même renforcé par l’arrivée de Simon Koster : la navigation au près. Doté de foils en C, l’IMOCA pensé et conçu par l’équipe d’Alex Thomson avec comme seul objectif le Vendée Globe, pâti en effet d’un sévère handicap par vent de face. « Les foils en L servent de plan anti-dérives aux autres bateaux et leur permettent de "cranter" dans l’eau, explique Alan. Ils créent davantage de vent apparent et vont donc aller de plus en plus vite, tout en remontant véritablement dans l’axe du vent. En revanche, ils ne tiendront jamais des angles aussi bas que nous au portant. Car si nos foils en C ne font office que de plans porteurs, et ne nous permettent donc pas "d'accrocher" dans la mer et nous font déraper, c’est justement ce pour quoi ils ont été conçus pour le vent arrière : ils nous permettent de glisser et donc d’aller très bas en angle, en nous rapprochant des 150° lorsque les bateaux plus polyvalents restent bloqués aux alentours des 130°. C’était le pari d’Alex de tout miser sur les allures portantes, largement prédominantes sur un tour du monde. » Face à des bateaux de toute dernière génération, de plus en plus polyvalents et aux mains de skippers aux dizaines d’années d’expérience et dont le talent n’est plus à prouver, Alan et Simon tirent également un autre constat : à 20 noeuds de moyenne dans toutes les allures, ces nouvelles fusées sont quasi « inatteignables ». Mais à la question qu’on lui pose régulièrement de modifier ces foils afin de « rentrer dans le rang », la réponse du navigateur est catégorique : C’est non. « Changer les foils signifierait changer de puits de foils et d’emplacement des puits, souffle-t-il. Cela représente un chantier à plus d’un million d’euros, ce n’est pas à l’échelle de notre projet. Et ce n’est pas non plus la philosophie du bateau. Il a été construit ainsi et nous le savions quand nous l’avons acheté. Si nous l’avons choisi, ce n’est pas pour en changer l’essence. » Objectif Vendée Globe donc, avec encore quelques transatlantiques au programme, majoritairement au portant ? « On va croiser les doigts pour ne pas avoir 3 jours de près sur la Transat Jacques Vabre, concède Alan. Je pense que nous sommes désormais au max de ce que nous pouvons faire au près avec ce bateau. Maintenant ce sera à nous, marins, de parvenir à gommer ses défauts et à le mener dans des allures où il marche le mieux. » La route jusqu’au départ du Vendée Globe, le 10 novembre 2024, reste longue et s’annonce encore riche en enseignements !
Photo © Martin Kéruzoré